Howard Phillips LOVECRAFT

 

et autres poèmes fantastiques

 

 

LA TERRE NOTRE MÈRE

 

 

Une nuit, me promenant, je descendis
Vers une vallée profonde, silencieuse et humide,
L'air stagnant était imprégné d'une corruption
Et d'une froideur qui me soulevaient le cœur je défaillais.
Les arbres nombreux de chaque côté
Ressemblaient à une bande d'effroyables gobelins
Et les branches se découpant sur le ciel se réduisant
Prenaient des formes que je redoutais... j'ignore pourquoi.
Je m'élançai plus avant, j'avais l'impression de chercher
Confusément une chose perdue comme la joie ou l'espoir.
Pourtant, en dépit de mes efforts,
Je ne trouvai rien, hormis les fantômes du désespoir.
Les murailles se resserraient comme je continuais
Et bientôt, de la lune et des étoiles privé,
J'étais blotti dans une crevasse rocheuse
Si profonde et ancienne que la pierre
Exhalait l'odeur de choses originelles et inconnues.
Mes mains explorant s'efforçaient de retrouver
Les traits de la paroi de cette vallée,
Lorsque, au sein de leur floraison, elles semblèrent
Palper des contours terrifiants pour mon esprit.
Mes yeux se plissant aucune forme
N'auraient pu voir ou reconnaître ;
Car ce que je touchais parlait de temps
Trop lointains pour le passage fugace de l'homme.
Les lichens s'accrochant à la roche, moites et blanchis,
M'interdisaient de lire l'histoire très ancienne
Mais une eau cachée, suintant doucement,
Chuchota des récits que je n'aurais pas dû connaître.
« Mortel, éphémère et hardi,
De grâce garde pour toi ce que je dis,
Pourtant songe parfois à ce qui a été,
Et aux scènes que ces rochers s'effritant ont contemplées :
Déjà anciennes avant que ta trace chétive
Survienne dans une moindre splendeur,
Il y eut des créatures vivantes qui vivent encore,
Bien qu'elles semblent mortes pour les êtres humains.
Je suis la voix de ta Terre Mère,
D'où naissent toutes les horreurs.»

 

H. P. Lovecraft

   

 

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